Mali, Vœux de Nouvel An à Koulouba : Les défis de l’heure, le temps du sursaut

Paix, sécurité, école, trêve sociale, gestion des productions céréalières, mise en œuvre des résolutions du Dialogue national inclusif, consommation de drogue… les sujets abordés par les leaders religieux et les légitimités traditionnelles traduisent les inquiétudes du moment.

Le chef de l’État a exhorté à la mobilisation de tous pour donner corps à l’espoir de paix

Garants de l’équilibre social de notre pays, les leaders religieux et les légitimés traditionnelles contribuent fortement à l’apaisement du climat social, au-delà à la recherche de solutions à la crise multidimensionnelle que le Mali traverse depuis des années.

Le mérite et l’importance de ces autorités morales ont encore été reconnus et rappelés, hier à Koulouba, lorsqu’elles sont venues présenter leurs vœux de nouvel an au président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, à sa famille et à ses collaborateurs. Outre le Premier ministre, Dr Boubou Cissé, la cérémonie s’est déroulée en présence des ministres et des membres du cabinet du chef de l’État.

Ouvrant la séquence des interventions, le représentant des familles fondatrices de Bamako, Souleymane Niaré, s’exprimant en langue nationale bambara, a d’abord fait des bénédictions et des prières pour la paix et la stabilité dans notre pays. Il ajoutera que les victimes civiles et militaires sont aussi au cœur de sa pensée et de ses prières. Souleymane Niaré a aussi mis un focus sur les vertus du dialogue, invitant le chef de l’État à toujours tendre la main à tous les fils du pays. Par ailleurs, se réjouissant des résultats probants de la campagne agricole, le porte-parole des familles fondatrices de Bamako demandera au président de la République de prendre des mesures idoines pour que toutes nos productions céréalières ne soient exportées. Exprimant son inquiétude face à la perte de certaines valeurs au Mali, M. Niaré fera un plaidoyer appuyé pour que l’école soit un lieu d’éducation et de formation.

Souleymane Niaré, représentant des familles fondatrices de Bamako

IMPLICATION DU HCI- Implication du Haut conseil islamique (HCI) afin de juguler l’insécurité dans plusieurs régions du pays ; tenue d’une série de rencontres avec les responsables des groupes armés en vue de parvenir à une stabilité et à une paix définitive ; contribution du HCI dans la réussite du Dialogue national inclusif (DNI) sont les premiers points soulevés par Chérif Ousmane Madani Haïdara qui s’est exprimé au nom de la communauté musulmane.

En outre, le président du Haut conseil islamique a chaleureusement remercié le président Keïta pour s’être engagé à mettre en œuvre les résolutions issues du Dialogue national inclusif. Dans la foulée, le leader religieux a sollicité les autorités pour l’implication du HCI dans le dispositif de mise en œuvre des résultats du DNI.

Chérif Ousmane Madani Haïdara a ensuite annoncé la tenue prochaine d’un grand meeting pour la paix avec la participation des différentes communautés de la Région de Mopti.

Un statut pour les imams et les autres autorités religieuses, l’inquiétante question de la consommation de drogue par les jeunes, l’ouverture anarchique des bars dans la capitale sont des sujets qui figurent aussi au nombre des préoccupations du président du HCI. Pour qui, il est essentiel pour les partenaires sociaux d’observer une trêve sociale, compte tenu de la situation difficile que traverse le pays. Comme l’orateur précédent, Chérif Ousmane Madani Haïdara a souhaité que le chef de l’État continue à tendre la main et d’être à l’écoute de tous les Maliens.

De son côté, le Cardinal Jean Zerbo, Archevêque de Bamako, a adressé au chef de l’État la reconnaissance de la communauté catholique du Mali pour ses messages et gestes de soutien à l’occasion des fêtes de Noël, de Pâques, du pèlerinage national à Kita. Selon lui, malgré les efforts fournis et qui se poursuivent, les défis pour notre pays en ce début d’année 2020 sont nombreux. Il s’agit du défi de la sécurité des personnes et des biens, l’insécurité sociale avec les crises de la famille se manifestant à travers la perte des valeurs humaines, les enfants et les jeunes qui ont peu de repères, l’augmentation de la délinquance et du banditisme, le problème foncier.

Pour sa part, le révérend Dr Nouh Ag Infa Yattara, président de l’Association des groupements d’églises et missions protestantes évangéliques du Mali (APEMPEM), a formé le vœu que tout au long de l’année 2020, l’arbre à palabre pousse dans le cœur de chaque Malien et que toutes les composantes de notre société viennent s’asseoir à son ombre.

ENNEMIS DU MALI- Dans ses réponses, le président de la République a salué et remercié tous ceux qui lui ont présenté leurs vœux à l’occasion du nouvel an. À ceux-ci, il renouvellera les mêmes prières et bénédictions. Se prononçant sur l’organisation du DNI, le président Keïta s’est dit heureux que le peuple malien se soit retrouvé dans une arène sereine, de qualité, pour se regarder en face, s’ausculter, quelques fois avec dureté, avec âpreté, mais toujours sans que la part de la courtoisie ait été empiétée.

À ce propos, il a souligné le rôle joué de façon souterraine par les autorités religieuses et les légitimés traditionnelles dans la réussite de la rencontre. Pour le chef de l’État au sortir de cette réunion, le Mali a parlé et souhaite maintenant que ceux que le pays a choisis pour conduire ses affaires du moment assument. «Et nous nous assumerons avec humilité, mais avec la force de la loi qui protège le faible. Nous avons licence à gérer dans le sens du souhait des Maliens. Nous le ferons en conviant chacun à en être. Ce n’est pas seulement une main qui est tendue, mais c’est le bras qui est tendu», a rassuré Ibrahim Boubacar Keïta, estimant que le temps du sursaut est arrivé.

Sur un tout autre plan, face aux difficultés auxquelles font face les Forces armées maliennes (FAMa), le chef suprême des Armées a promis que les efforts de formation et d’équipement se poursuivront.

 «Pour cela, nous avons besoin de partenariat solide, efficace et compétent, quiconque dira le contraire raconte n’importe quoi… Il s’agit d’une sécurité collective. L’intérêt du Mali veut que nous ayons tous les atouts, parmi lesquels il y a ce partenariat que nous souhaitons respectable et respecté», a-t-il assené.

Pour le président Keïta, vouloir faire croire que nos amis sont nos ennemis est contraire aux intérêts du Mali, des Maliens, des FAMa qui se battent pour que nous soyons libres. Tous ceux-là qui tiennent des discours de ce genre là, a-t-il poursuivi, sont les ennemis du Mali, sont les ennemis des FAMa. Ils voudraient, selon le chef de l’État, que nos enfants soient jetés en pâture devant des forces hostiles lourdement armées, équipées avec l’argent de la drogue, avec l’argent également de quelques pays complices qui viennent les aider dans cette sale besogne. Selon le président Ibrahim Boubacar Keïta, aujourd’hui Barkhane aide les FAMa, aujourd’hui Barkhane apporte de l’eau à Boulkessy. Sur un autre registre, Ibrahim Boubacar Keïta a reconnu que la question de la drogue est devenue très grave. Pour étayer ses propos, il confiera qu’avec désormais des laboratoires installés dans notre pays, nous sommes devenus maintenant transformateurs de drogue.

Par ailleurs, le chef de l’État est totalement en phase avec ses interlocuteurs du jour sur la nécessité d’observer une trêve sociale en ces temps où près du quart des ressources budgétaires de notre pays est consacré aux dépenses de défense. Il a également promis que les leaders religieux et les légitimités traditionnelles feront partie du Comité de suivi du DNI.

Massa SIDIBÉ

Source : l’Essor

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