Les révélations de Mamadou Synsi Coulibaly : «15 généraux évoluant dans le monde des affaires sont en train de tuer les entreprises maliennes»

«Ils sont dans le milieu des hydrocarbures, de l’import-export, du BTP…»

Le Conseil national du patronat du Mali (CNPM) a organisé, le samedi dernier, un diner gala de présentation de vœux dans le somptueux château du patron des patrons maliens, Mamadou Synsi Coulibaly, à la Cité du Niger. L’occasion fut bonne pour “Synsi” de pointer du bout des doigts tous les goulots d’étranglement des entreprises au Mali : hausse du prix de l’électricité, corruption, intrusion d’une quinzaine de généraux dans le milieu des affaires.

Ils ont massivement fait le déplacement pour ce diner gala. Ils, ce sont non seulement les milieux d’affaires, mais aussi de nombreux diplomates. Connu pour ses sorties fracassantes, le président du Cnpm n’a pas dérogé à la règle, même s’il a remercié le président de la République Ibrahim Boubacar Kéïta et son Premier ministre, Dr Boubou Cissé, pour leur engagement à promouvoir le milieu des entreprises. “Mais la volonté de ces deux personnalités ne suffit pas, il faut encore d’engagement de tous les acteurs” introduit le patron des patrons maliens. Selon lui, les entreprises maliennes font face à trois difficultés majeures qui ont pour noms : hausse du prix de l’électricité, corruption, intrusion d’une quinzaine de généraux dans le milieu des affaires.

Privatiser Edm-sa

S’agissant des difficultés liées à l’électricité, M. Sinsi n’a pas mâché ses mots. A le croire, pour qu’un pays se développe, il faut de l’énergie. “Mais de nos jours, le ministre de l’Energie, le Directeur général de Edm-sa n’ont fait aucun effort pour que l’entreprise se développe dans notre pays, surtout les entreprises de production. Pire, l’Energie du Mali a pris des directives pour hausser les prix sans demander ni aux consommateurs ni à la société civile, encore moins aux entrepreneurs.  Cette décision a mis nos entreprises dans une situation de précarité, surtout les entreprises de production. Nous souhaitons que tous les partenaires du Mali, la société civile, se joignent à nous pour que ce secteur soit libéralisé, privatisé, le plus vite possible”, a proposé le président du Cnpm. Il a aussi demandé l’application des dispositions tarifaires de la Cedeao dans le domaine de l’électricité. “Sinon, il n’y aura plus d’attractivité pour les investisseurs” a-t-il averti.

Le prélèvement des impôts au sein des entreprises a été le second point évoqué lors de ce diner gala. A cet effet, il a laissé entendre que les impôts créent “une insécurité juridique dans nos entreprises, ils ne font aucun effort pour rationnaliser les interventions dans les entreprises, mutualiser les informations des services de contrôle du Ministère des Finances tel que la digitalisation, la numérisation des données, ce qui va leur permette d’être moins présent physiquement dans nos entreprises”.

Sans déclaration de biens inspecteurs des impôts pas de contrôle

A l’en croire, la productivité dans leurs entreprises a baissé considérablement avec cette intrusion des inspecteurs des impôts dans leurs services. “Je demande la cessation de tout contrôle abusif dans nos entreprises dès le mardi prochain (ndlr : mardi 21 janvier)” a exigé l’orateur. Ce n’est pas tout, il a enfoncé le clou en ces termes : “Nous exigeons et ordonnons que les inspecteurs en charge des impôts, des domaines, de l’hygiène et de la sécurité…déclarent leurs biens à l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite.  Ce, conformément à la loi votée à l’Assemblée nationale. Ils doivent se soumettre à cette déclaration comme nous aussi nous nous soumettons au paiement des impôts. D’ailleurs, nous allons désormais demander à  tout inspecteur qui débarque dans nos entreprises pour des contrôles, de présenter d’abord un récépissé de sa déclaration de biens”.

Echec de la classe politique

Cette rencontre a été aussi l’occasion pour Sinsi de critiquer vertement la classe politique malienne pour sa gestion des affaires publiques. “Trop de politique tue l’économie, la classe politique au Mali a échoué. Elle a le dos au mur. De reculade en reculade, c’est la chute dans l’abîme. Et elle veut nous amener tous dans l’abime avec elle. Elle nous fait croire que c’est la faute de l’autre, de la Minusma, des occidentaux.

 Il faut qu’elle nous dise la vérité.  Je pense que ni les Russes, encore moins les Japonais ne feront pas ce pays à leur place. Les politiques ont l’obligation de faire les choses comme il se doit, sinon qu’elles dégagent” a soutenu le président du Cnpm.

Pour lui, comme si tout cela ne suffisait pas, leurs entreprisses soufrent aussi par la faute d’une quinzaine de généraux.

“Ces généraux nous les connaissons tous, ils se sont lancés dans le milieu des affaires en faisant des importations de carburant, de l’import-export, du BTP. Que cela cesse. Ou bien nous les invitons à déposer les galons et venir compétir sur le même terrain que nous dans la légalité car ils sont les premiers au Mali dans leur secteur d’activités. Ces généraux ne payent ni impôts ni taxes et nous, nous sommes là en train de moisir. Il est temps que nous nous donnions la main pour lutter contre ces généraux tueurs de nos entreprises”, a demandé Mamadou Sinsi Coulibaly à ses collègues.

              Kassoum THERA

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