Exclusif : Le président malien IBK confirme l’ouverture d’un dialogue avec des chefs jihadistes

Le président malien a accordé un entretien exclusif à France 24 et RFI ce lundi, en marge du sommet de l’Union africaine, à Addis Abeba, en Éthiopie. Il confirme notamment l’ouverture d’un dialogue avec les chefs jihadistes Iyad Ag-Ghaly et Amadou Koufa. Ibrahim Boubacar Keïta revient aussi sur l’avancée de l’armée malienne vers la ville de Kidal, ainsi que sur la situation sécuritaire dans le Sahel qu’il qualifie de « très préoccupante ».

Dans un entretien exclusif accordé à France 24 et RFI ce lundi 10 février 2020, le chef de l’État malien, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), confirme pour la première fois l’ouverture d’un dialogue avec les chefs jihadistes Iyad Ag-Ghaly et Amadou Koufa, afin de tenter de venir à bout du terrorisme.
« Parler avec les djihadistes et lutter contre le terrorisme n’est pas antinomique. J’ai le devoir et la mission aujourd’hui de créer tous les espaces possibles et de tout faire pour que, par un biais ou un autre, on puisse parvenir à quelque apaisement possible », affirme-t-il. « Il est temps que certaines voies soient explorées ».
S’il assure que cette tentative de discussion est nécessaire, IBK ne se dit toutefois « pas naïf » quant aux intentions de ces interlocuteurs. « Nous ne sommes pas des grands candides, mais nous ne sommes pas des gens obtus non plus », explique-t-il.
« L’armée malienne à Kidal vendredi »

Le président malien confirme par ailleurs que l’armée malienne est « en mouvement » vers la ville de Kidal, au nord, qui échappe à son contrôle depuis 2014, affirmant qu’elle « devrait y être en principe ce vendredi ». 
Selon la mission de l’ONU dans le pays (Minusma), le retour de l’armée malienne dans la ville symbole de Kidal, contrôlée par d’anciens rebelles séparatistes touaregs, constituerait une « étape déterminante dans la mise en œuvre » de l’accord de paix d’Alger de 2015. L’application de cet accord est considérée comme un facteur primordial d’une sortie de crise au Mali, confronté depuis 2012 aux insurrections indépendantistes, salafistes et jihadistes et aux violences intercommunautaires qui ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.
« Sans Serval, que serions-nous aujourd’hui ? »

Enfin, le président malien qualifie la situation actuelle au Sahel de « très préoccupante » et dénonce l’arrivée « d’éléments » venus de Syrie et d’Irak, via la Libye. Il affirme, à ce titre, que la réunion du G5 Sahel à Pau organisée le 13 janvier 2020 autour d’Emmanuel Macron a été « utile ».

Le président malien nie par ailleurs toute « duplicité » vis-à-vis de la France, et condamne ceux qui manifestent contre la présence française, affirmant qu’ils sont « anti-Maliens ». « Sans Serval, que serions-nous aujourd’hui ? », s’interroge-t-il.

Le chef de l’État se dit par ailleurs optimiste quant au maintien d’une présence militaire américaine dans la région malgré les indications de retrait de Washington, soulignant que cette présence était plus nécessaire face à des groupes de plus en plus aguerris et meurtriers.
 Par : Christophe BOISBOUVIER|Marc Perelman

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