Ogossagou : Des crimes contre l’humanité ?

Le statut de Rome de la CPI établit les compétences de la Cour sur les 4 types de crimes : le crime de génocide ; les crimes contre l’humanité ; les crimes de guerre ; et le crime d’agression. Son article 7 élucide sur le crime contre l’humanité et énumère des actes susceptibles, « lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique… En l’espace de dix mois, le village d’Ogossagou (situé dans la région de Mopti) a été le théâtre de massacres en masse perpétrés par des individus qui agissent en toute impunité. Le vendredi 14 février 2020, une attaque d’une rare violence a encore frappé ce village. Bilan : Plus de 30 victimes et de nombreux blessés. Alors la CPI (Cour pénale internationale) est vivement interpelée.

Un an après, Ogossagou a été de nouveau  la cible  d’une nouvelle attaque. En effet,  dans la nuit de jeudi à vendredi 14 février 2020, des individus armés pénètrent dans  le village, des habitants sont tués, des maisons sont incendiées, du bétail volé. L’attaque menée par une trentaine d’hommes armés, a été favorisée par le retrait, quelques heures auparavant, de l’armée, a expliqué le chef du village

Cette nouvelle attaque est la seconde que subit ce village. En effet, le 23 mars 2019, l’attaque par des hommes armés de ce village peulh d’Ogossagou, avait fait au moins 174 morts civils. Cette paisible localité peulhe avait été investie, tôt le matin du 23 mars 2019, par des assaillants armés jusqu’aux dents. Ceux-ci, ont, dans leur furie meurtrière, tiré sur  tout ce qui bougeait…

Possible crime contre l’humanité

Ce drame  avait suscité une vague d’indignation et provoqué plusieurs enquêtes de la part d’organisations internationale. Ainsi, la Minusma qui avait déployé sur le terrain une équipe d’enquêteurs chargée « d’établir les circonstances de l’attaque et le déroulement des faits » et de « permettre de situer les responsabilités de ce crime », a livré ses conclusions préliminaires le 25 mars 2019.

Selon la Division des droits de l’homme et de la protection de la Minusma, l’impunité dont bénéficient les groupes d’auto-défense depuis un certain moment au Centre du Mali alimente davantage le cycle des violences et d’atteintes aux droits de l’homme commises à l’égard des populations civiles.

La Division des droits de l’homme et de la protection de la mission onusienne pointe du doigt aussi : « l’impunité » dont bénéficient ces groupes. Ainsi, les atteintes aux droits de l’homme documentées à Ogossagou, prises dans leur contexte, pourraient être qualifiées de crimes contre l’humanité, s’il est démontré que cette attaque s’inscrivait dans le contexte d’une attaque systématique ou généralisée contre la population civile et jugés par un tribunal compétent, en vertu du droit international pénal, particulièrement l’article 7 du Statut de Rome.. La mission onusienne appelle sans ambages la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) et indexe les auteurs de ces évènements abominables comme d’éventuels potentiels justiciables devant Fatou Bensouda, Procureure générale de la CPI. La description du contexte des graves atteintes aux droits de l’homme finit de nous en convaincre : « L’attaque planifiée, organisée, et coordonnée sur la partie peule du village d’Ogossagou s’inscrivait dans un contexte de nombreuses autres attaques similaires par des groupes de chasseurs traditionnels, à l’encontre des populations peules ». La mission d’enquête spéciale sur les graves atteintes aux droits de l’homme commis à Ogossagou le 23 mars 2019, enfonce le clou dans ses conclusions préliminaires : « Malgré son ampleur, cet incident n’est pas isolé mais s’inscrit dans un contexte d’accentuation progressive des violences sur fond de tensions communautaires dans la région de Mopti, où des groupes d’auto-défense communautaire, possédant des armes de guerre, continuent d’agir en toute impunité. Dans le seul cercle de Bankass, plus de 37 cas d’atteintes aux droits de l’homme ayant causé la mort d’au moins 115 personnes, sont attribuables à ces groupes depuis novembre 2018, y compris lors des attaques perpétrées par des groupes de chasseurs traditionnels à l’encontre de civils, dans les parties peules des villages de Koulogon, Minima Maoudé ou encore Libé, entre janvier et février 2019 ». Le statut de Rome de la CPI établit les compétences de la Cour sur les 4 types de crimes : le crime de génocide ; les crimes contre l’humanité ; les crimes de guerre ; et le crime d’agression. Son article 7 élucide sur le crime contre l’humanité et énumère des actes susceptibles, « lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette Attaque ».

Le bureau du procureur de la CPI, Fatou Bensouda avait annoncé de son côté que : le massacre de Ogossagou ne  fera pas l’objet d’une  enquête spécifique ; « mais tous les crimes commis depuis 2013 font l’objet d’une seule et même enquête qui se poursuit aujourd’hui », avait  explique Fadi el-Abdallah, le porte-parole de la CPI, en visite c à Bamako une semaine après   la tuerie de Ogossagou.

Mémé Sanogo

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