L’Italie dénombre 427 morts en 24 heures, soit un total de 3 405 personnes décédées. Giuseppe Conte a annoncé la prolongation du confinement après le 3 avril. Pendant ce temps, en Allemagne, le taux de mortalité reste extrêmement bas.
La protection civile italienne a fait état jeudi de 427 décès supplémentaires dus au coronavirus au cours des 24 dernières heures, ce qui porte le bilan national à 3.405 morts depuis le 21 février. La veille, 475 nouveaux décès avaient été signalés. Ce bilan est désormais plus lourd que celui de la Chine, où le coronavirus a fait 3.245 morts.
Le nombre total de cas dénombrés en Italie est passé en 24 heures de 35.713 à 41.035. Cette hausse de 14,9% est supérieure à celle des trois derniers jours, selon la Protection civile. Sur ce total, 4.440 personnes sont complètement rétablies, et 2.498 se trouvent en soins intensifs.
L’Italie a mobilisé son armée pour évacuer les cadavres des victimes du nouveau coronavirus à Bergame, ville située en plein coeur du principal foyer épidémique dans le pays et dont les services funéraires sont débordés.
Des images filmées par des habitants de la cité lombarde au nord-est de Milan et diffusées sur le site du journal local Eco di Bergamo montrent une longue colonne de véhicules militaires circuler de nuit dans les rues de la ville et récupérer des cercueils dans le cimetière.
Un porte-parole de l’armée a confirmé jeudi que 15 camions et 50 soldats avaient été déployés pour transférer ces corps vers des provinces voisines. Les autorités locales de Bergame avaient auparavant lancé un appel à l’aide pour procéder aux crémations des corps des victimes, le crématorium de la ville étant débordé.
300 morts rien qu’en Lombardie
Il y a eu plus de 300 morts supplémentaires dans la seule Lombardie, où se situe la province de Bergame, la plus touchée avec plus de 4.000 cas de contamination. L’Italie a imposé le confinement à sa population et, face à un bilan qui ne cesse de s’alourdir, le président du Conseil, Giuseppe Conte, a déclaré que ces restrictions seraient prolongées au-delà du 3 avril.
Les images des camions de l’armée évacuant des cadavres illustrent la rupture à laquelle semble parvenir le système de santé italien, en particulier dans les régions du nord du pays les plus durement touchées.
Giacomo Angeloni, responsable des cimetières de Bergame, a déclaré cette semaine que le crématorium de la ville fonctionnait en permanence, incinérant 24 corps par jour, soit quasiment deux fois plus que le maximum habituellement prévu, et qu’il ne pourrait pas tenir ce rythme. Alors que les morgues débordent, les bancs de la chapelle du crématorium ont été enlevés pour faire de la place mais les cercueils arrivent chaque jour en plus grand nombre.
Le gouverneur de la Lombardie, Attilio Fontana, a déclaré que les médecins et les infirmières dans les hôpitaux de la région étaient à bout de forces. « Je suis inquiet de la possibilité qu’ils puissent succomber physiquement et psychologiquement parce que s’ils succombaient, ce serait vraiment une catastrophe », a dit Attilio Fontana à Radio Capital.
Taux de mortalité extrêmement bas en Allemagne
Dans le même temps, l’Allemagne enregistre un grand nombre de malades, mais un taux de mortalité extrêmement bas : le mystère demeure concernant l’exception allemande face à l’épidémie du nouveau coronavirus.
Avec officiellement 10.999 cas répertoriés jeudi pour 20 morts, le taux de létalité s’établit dans le pays à seulement 0,18%, contre quelque 4% en Chine ou en Espagne, 2,9% en France, voire 8,3% en Italie.
« C’est difficile à démêler (…) Nous n’avons pas de vraie réponse et c’est probablement une combinaison de différents facteurs », a admis cette semaine Richard Pebody, responsable à l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Voici les principales hypothèses avancées par les spécialistes :
Meilleur équipement médical. Avec 25.000 lits de soins intensifs avec assistance respiratoire, l’Allemagne est particulièrement bien équipée comparée à ses voisins européens. La France en a environ 7.000 et l’Italie autour de 5.000. Berlin a d’ailleurs annoncé mercredi vouloir doubler ce nombre dans les hôpitaux dans les semaines à venir. Les patients malades peuvent jusqu’à présent rapidement être suivis et le pays ne redoute pas, dans l’immédiat, que ses hôpitaux soient saturés, comme c’est par exemple le cas en Italie ou dans l’Est de la France.
Cette explication ne semble en revanche pas suffisamment significative pour expliquer la différence du nombre de décès dans les premières semaines, alors que ses voisins européens avaient également mobilisés leurs hôpitaux. En revanche, ce point pourrait peser dans les mois à venir si la crise venait à s’aggraver.
Des tests précoces. « Nous avons reconnu très tôt ici la maladie dans notre pays : nous sommes en avance en matière de diagnostic, de détection », affirme Christian Drosten, directeur de l’Institut de virologie à l’hôpital de la Charité à Berlin.
Ce critère, associé à l’important maillage territorial de laboratoires indépendants en Allemagne qui dès janvier – alors que le nombre de cas positifs était encore très faible – ont commencé à tester les gens, aurait permis aux docteurs du pays de mieux diagnostiquer la maladie et d’écarter en quarantaine les cas les plus à risque.
Ces nombreux laboratoires augmentent la capacité de dépistage, estimé à quelque 12.000 par jour par l’Institut Robert Koch (IRK), qui pilote la lutte contre l’épidemie. Se faire tester en Allemagne reste compliqué mais, aux dires des experts, plus simple que dans d’autres pays: l’apparition de symptômes couplée au contact avec un cas confirmé ou une personne revenant d’une zone à risque suffisent.
Une population jeune touchée. « En Allemagne, plus de 70 % des personnes qui ont été identifiées comme infectées jusqu’à présent ont entre 20 et 50 ans », a expliqué le président de l’IRK. La maladie s’y est d’abord principalement propagée dans une population relativement jeune et en bonne santé, moins consciente des risques du coronavirus car n’étant pas la population la plus à risques.
À l’instar des Scandinaves, les premiers Allemands infectés sont revenus dans le pays après avoir été contaminés lors d’un séjour de ski en Italie ou en Autriche. Cela reste cependant le signe que l’épidémie n’en est encore qu’à ses débuts en Allemagne. Avec près de 25% de sa population âgée de plus de 60 ans, selon l’institut Statista, le pays craint de voir le nombre de ses décès fortement augmenter dans les prochains jours.
Absence de tests post-mortem. Une autre explication, avancée notamment côté italien pour comprendre l’écart de mortalité, est l’absence en Allemagne de tests au coronavirus post-mortem sur les personnes décédées. « Nous ne considérons pas que les tests post-mortem soient un facteur décisif. Nous partons du principe que les patients sont diagnostiqués avant de mourir », se défend auprès de l’AFP l’IRK.
Or ces tests sont bien effectués en France par exemple. Concrètement, cela veut dire que lorsqu’une personne décède en quarantaine à domicile et non pas à l’hôpital, il y a de fortes chances que son cas n’entre pas dans les statistiques, ce dont s’est étonné Giovanni Maga, directeur de l’Institut de génétique moléculaire du Conseil national de la recherche de Pavia (Italie) dans un entretien à Euronews.
Avec AFP et Reuters
Source : France 24