Le nombre de décès dus à la maladie explose aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, pendant que le continent asiatique s’interroge sur une possible sortie de crise.
La France attend toujours le pic de l’épidémie. Ce vendredi a vu un nouveau record de décès : 588 morts de plus en 24 heures à l’hôpital, pour un total de 6 507 morts recensés. Car le décompte dans les Ehpad se poursuit, au moins 1 416 morts. Ce rebond intervient alors que le nombre de décès avait diminué jeudi (471) par rapport à mercredi (509).
L’ile de France et le Grand Est sont toujours en grande tension, mais dans le Grand Est on semble voir une lueur d’espoir : le nombre de personnes hospitalisées en réanimation n’a augmenté que de 2,8% entre mercredi et jeudi, contre 38% il y a une quinzaine de jours. On note également un allègement de la pression sur les urgences et les centres 15.
Accélération de l’épidémie au Royaume Uni
En Europe, l’épidémie va désormais très vite au Royaume-Uni avec une hausse de 20% des décès quotidiens. Le pays a atteint ce vendredi un record de 684 décès en 24h et un total plus de 3 600 morts. Un immense hôpital de campagne, mis en place en seulement neuf jours dans un centre de conférences de Londres, a ouvert vendredi pour absorber la déferlante de malades. Avec un personnel prévu de 16 000 soignants, cet hôpital géant, sans équivalent en Grande-Bretagne, tente de répondre à l’accélération de sa propagation. Il précède quatre autres établissements du même type annoncés en Angleterre, à Birmingham (centre), à Manchester (nord), Harrogat (nord) et Bristol (sud-ouest), représentant au total plus de 7 000 lits.
La reine Elisabeth II, 93 ans, a enregistré une allocution pour les habitants du Royaume-Uni et des pays du Commonwealth liée à la pandémie. Elle sera diffusée dimanche, a annoncé le palais de Buckingham. Son adresse annuelle et traditionnelle le jour de Noël mis à part, il s’agit de la quatrième intervention extraordinaire de la souveraine en 68 ans de règne. Elisabeth II s’était notamment exprimée lors de la guerre du Golfe en 1991 et la mort de Diana en 1997. Testé positif il y a une semaine, le Premier ministre Boris Johnson a quant à lui annoncé vendredi qu’il avait toujours de la fièvre et allait donc prolonger sa quarantaine au-delà des sept jours recommandés par les autorités sanitaires britanniques.
Ralentissement en Espagne, Italie et Allemagne
Le bilan continue aussi de s’alourdir en Italie avec 766 décès supplémentaires en l’espace de 24 heures, et au total désormais 14 681 morts. Sur trois jours, ce bilan quotidien reste compris entre 722 et 766 décès, alors qu’il était encore de 837 décès supplémentaires mardi et de 919 vendredi dernier, journée la plus noire de l’épidémie. En tendance, le nombre de nouvelles infections reste compris pour le cinquième jour d’affilée entre 4 050 et 4 782, tendant à confirmer l’espoir des autorités que la courbe de l’épidémie est à un plateau et qu’un reflux pourrait suivre dans un proche avenir. Reste que les Italiens passeront probablement le 1er mai à la maison : « Je pense que oui, je ne crois pas que la situation aura changé à cette date » a prévenu le chef de la protection civile italienne, Angelo Borrelli qui coordonne la réponse sanitaire à la pandémie.
Le plus grand crématorium de Milan, débordé, a fermé ses portes, et des corps ont été emmenés de Bergame, ville la plus touchée, vers d’autres régions pour être incinérés.
En Espagne, pays le plus endeuillé au monde derrière l’Italie, le nombre de morts en 24 heures a, vendredi comme la veille, dépassé les 900, portant le bilan total à presque 11 000 décès, mais le rythme de hausse des décès, hospitalisations et cas continue de ralentir. En Allemagne, les mesures de restrictions commencent à ralentir la propagation du virus, assurent les autorités sanitaires qui insistent sur la nécessité de les « maintenir ». « Ces chiffres donnent un peu d’espoir » a dit la chancelière. Angela Merkel est sortie d’une quarantaine de 14 jours à son domicile après trois tests négatifs au Covid-19. Elle avait décidé de s’isoler après avoir été en contact avec un médecin testé positif.
En Europe centrale, l’Autriche et plusieurs pays voisins imposent désormais le port du masque dans les commerces ou les lieux publics. Obligatoire partir de ce lundi pour les autrichiens, cette mesure est un « changement culturel » a lui-même reconnu le chancelier Sébastian Kurz. Pour faciliter l’adaptation et désamorcer les critiques sur la pénurie de masques, le gouvernement autrichien a demandé aux supermarchés de fournir gratuitement le nouveau sésame aux clients. L’usage est déjà obligatoire dans les lieux publics en Slovénie, en République tchèque et en Slovaquie. En Autriche, il n’est pas encore question de sanctionner les contrevenants mais c’est déjà le cas en République tchèque où des amendes de 10 000 couronnes (366 euros) ont été infligées. La police a ainsi rappelé à l’ordre un groupe de nudistes rassemblés au bord d’un lac par un temps particulièrement clément le week-end dernier.
Les Etats-Unis nouvel épicentre de l’épidémie ?
Avec la moitié des près de 53 700 décès dans le monde, l’Europe reste le continent le plus touché, mais avec près de 6 000 morts, mais les Etats-Unis sont en passe de devenir le nouvel épicentre de la pandémie. En 24 heures, 1 169 morts ont été enregistrés, du jamais vu dans un seul pays, et une hausse extrêmement importante : un tiers par rapport au comptage de la veille (884) et le bilan quotidien le plus élevé jamais enregistré dans un seul pays. Le maire de New-York, Bill de Blasio, a demandé à ses administrés de ne sortir qu’avec le visage couvert, anticipant une possible recommandation nationale des autorités sanitaires. Dans des centres de conventions, des salles sportives et des parkings, des milliers de lits d’hôpitaux sont en train d’être installés en urgence de Los Angeles à Miami pour parer à la vague imminente du coronavirus. Mais un autre problème se profile déjà : le manque de personnels soignants pour les gérer. Le virus a déjà tué aux Etats-Unis au total 6 000 personnes et devrait y faire entre 100 000 et 240 000 morts, selon la Maison Blanche.
Très critiqué par l’opposition pour sa réaction jugée trop lente, le président turc Recep Tayyip Erdogan a annoncé un confinement obligatoire pour les personnes âgées de moins de 20 ans à partir de minuit vendredi, durcissant les mesures pour enrayer l’épidémie de nouveau coronavirus qui s’accélère en Turquie. Les véhicules n’auront par ailleurs plus le droit d’entrer ou sortir dans 31 villes, dont Istanbul et Ankara, pendant 15 jours. Les plus de 65 ans et les malades chroniques faisaient déjà l’objet d’un confinement obligatoire.
Au Pérou et au Panama, qui ont restreint les déplacements de leur population, femmes et hommes ne sont plus autorisés à sortir de chez eux le même jour pour faire les courses. Au Brésil en revanche, le président Bolsonaro qui jusqu’à il y a quelques jours qualifiait encore le virus de « petite grippe » a affirmé vendredi que la société brésilienne serait incapable de tenir deux ou trois mois en confinement pour combattre le coronavirus. » Vous connaissez ma position: cela débouchera sur du chômage de masse », a-t-il dit à ses partisans rassemblés devant la résidence présidentielle de Brasilia.
A rebours de la quasi-totalité des dirigeants de la planète, le président brésilien refuse toujours l’idée d’un confinement et a dénoncé les mesures de » distanciation sociale » prises au niveau d’Etats et de municipalités du Brésil.
D’après les dernières données officielles disponibles, le Covid-19 a tué 324 patients au Brésil pour 8 044 cas confirmés de contamination au nouveau coronavirus.
Situation contrastée sur le continent asiatique
La Chine organisera samedi un moment de recueillement national de trois minutes à la mémoire des personnes décédées des suites de l’épidémie de Covid-19, a annoncé le gouvernement. A 10H00 locales (02H00 GMT), l’ensemble du pays se figera, tandis que les sirènes et klaxons des voitures, trains et bateaux retentiront en hommage aux victimes. Le drapeau national sera mis en berne dans tout le pays et dans les ambassades et consulats à l’étranger. La Chine suspendra également samedi toutes les activités publiques de divertissement et de loisir sur son territoire.
Ce moment de recueillement national sera également organisé à la mémoire des 14 personnes qualifiées jeudi par la Chine de « martyrs » de l’épidémie. Parmi eux figurent le docteur Li Wenliang, décédé du Covid-19. Cet ophtalmologue de 34 ans avait été accusé par la police de diffuser des « rumeurs » après avoir alerté des confrères de la propagation d’un virus semblable au Sras. A Wuhan, berceau de l’épidémie, la quarantaine drastique a commencé à être levée: la circulation reprend et les magasins rouvrent, mais la population reste sur le qui-vive.
En revanche à Singapour, où avait réussi à contenir l’épidémie de coronavirus notamment en traçant les cas et en effectuant des tests, le pays est désormais confronté à une résurgence des cas d’infections. Le premier ministre a annoncé ce vendredi la fermeture des écoles (sauf pour les enfants dont les parents doivent continuer à travailler et n’ont pas d’alternative), et des entreprises à partir de mardi et a demandé aux habitants de rester chez eux. Singapour a aussi interdit son territoire aux non-résidents. Singapour a enregistré 1 114 cas d’infections par le Covid-19 et cinq morts.
En Inde, la police a bouclé une partie des accès à Dharavi, l’un des plus grands bidonvilles d’Asie, dont les ruelles étroites et surpeuplées sont mondialement connues depuis le film Slumdog Millionaire. Huit zones dites d’’endiguement ont été mises en place à Dharavi, où vivraient un million de personnes. » Nous avons confiné dans leurs domiciles les habitants et bouclé les accès pour que personne ne puisse entrer ou sortir de ces zones. Nous avons aussi renforcé le contrôle de la distanciation sociale « , a expliqué Vijay Khabale-Patil, porte-parole de la municipalité de Bombay.
Les autorités craignent que le virus se propage de manière exponentielle dans le bidonville géant. Les décès de deux habitants de Dharavi, près de Bombay, et l’annonce de la contamination d’un troisième, ont conduit les autorités à prendre des mesures drastiques, quelques heures après que le Premier ministre Narendra Modi a appelé ses concitoyens confinés à produire de la lumière dimanche soir à leurs fenêtres ou sur le pas de leur porte contre » les ténèbres du coronavirus « . L’Inde a officiellement largement échappé à la pandémie qui se déchaîne dans le monde, avec seulement 2 300 cas recensés, dont 56 décès, mais ces chiffres, jugent les observateurs, sont vraisemblablement sous-estimés en raison d’un faible dépistage.
Plus de 3,9 milliards de personnes, soit la moitié de la population mondiale, sont désormais appelées ou contraintes à rester confinées chez elles pour lutter contre la propagation du Covid-19, selon un comptage de l’AFP. Ce seuil de 50% de l’humanité (7,8 milliards, selon l’ONU) a été atteint après l’instauration d’un couvre-feu en Thaïlande (à partir de ce vendredi).
Source : RFI