AU MALI, LE MYSTÈRE MOUSSA DIAWARA, ANCIEN PATRON DE LA SÉCURITÉ D’ETAT

Invisible depuis le coup d’Etat du 18 juillet, l’ex-directeur général des renseignements intérieurs fut l’un des hommes clés du pouvoir déchu.

Chaque coup d’Etat conserve sa part d’inconnu, une fumée qui se dissipe souvent trop tard pour que la vérité conserve une chance d’apparaître. Au Mali, le principal mystère du putsch qui a poussé Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) à la démission le 18 août porte un nom : Moussa Diawara. Un général dont tout Bamako connaît le patronyme, mais dont les actes demeurent entourés du secret dû à sa fonction. Evoquer Moussa Diawara au Mali contraint souvent à conjuguer ses phrases au conditionnel.

Patron de la toute-puissante Direction générale de la sécurité d’Etat, les renseignements intérieurs, durant toutes les années de présidence IBK (2013-2020), l’officier est invisible depuis le putsch. Le président déchu est parti, accompagné de son épouse, se faire soigner à Abou Dhabi. Son fils Karim, qui était devenu l’incarnation de la gabegie du régime, s’est exilé à Abidjan. Son dernier premier ministre, Boubou Cissé, les ministres de la défense, de l’économie et des finances, le président de l’Assemblée nationale et les principaux officiers généraux ont été placés en détention dans le camp militaire de Kati. Moussa Diawara ?

« Il a fui en Gambie », avance une source parmi les mieux informées du pays. « Il s’est envolé avec un vol d’Ethiopian Airlines pour rejoindre sa famille qu’il a installée à Dubai », croit savoir une autre. « On le dit toujours planqué dans une villa à Bamako », affirme une troisième. Ceux qui savent vraiment ne disent rien, mais il est en revanche un point sur lequel tous s’accordent : avant et pendant le déroulé du coup d’Etat, certains faits et gestes du patron de « la SE », comme il est coutume d’appeler l’institution la plus crainte du Mali, interpellent.

CONFIANCE DU PRÉSIDENT

Tout d’abord, le contexte. La démission forcée d’IBK intervient au moment où une partie des actes de Moussa Diawara sortent de l’ombre. Le dernier rapport du Groupe d’experts des Nations unies sur le Mali n’a pas encore été rendu public, mais, depuis la mi-juillet, un document de travail a été remis au Conseil de sécurité et Bamako a été informé de ses conclusions. Trois jours avant le coup, le rapport fuite dans la presse. Moussa Diawara y est pointé du doigt pour une tentative de « pression sur le gouvernement nigérien pour qu’il libère les membres du réseau de trafic [de cannabis] de Mohamed Ben Ahmed Mahri, dit Rouggy. (…) Le réseau de Rouggy à Niamey a été démantelé en avril 2018. » Selon les auteurs du rapport, Moussa Diawara et son adjoint chargé de la lutte antiterroriste, le colonel Ibrahim Sanogo, recevaient en contrepartie de cette protection « des versements mensuels au moins jusqu’en juillet 2018 » de la part de Mohamed Ould Mataly, un député sous sanction de l’ONU et du trésor américain, membre de la Plateforme, un groupe armé largement soutenu par la sécurité d’Etat.

Source : lemonde

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