L’URD, l’ADEMA et le RPM appellent à voter Oui le 18 juin : Contrainte ou choix de la conviction ?

Si l’Union Pour la République et la Démocratie, URD, le seul grand parti qui a tenu allumé le flambeau de l’opposition au régime d’Ibrahima Keita, peut bien justifier son soutien à la nouvelle constitution, voir à la transition, les partis qui ont collaboré avec IBK jusqu’à la chute de son régime déploieront des efforts titanesques pour convaincre l’opinion du bien-fondé de leur choix. L’ADEMA et le RPM, puisque c’est d’eux qu’il s’agit devraient faire le choix contraire à l’appel pour un OUI à la nouvelle constitution et cela par souci de cohérence et par respect à la mémoire de l’illustre disparu, IBK, dont le leadership n’a jamais été contesté par ces formations alliées à son pouvoir. Le soutien au régime, même transitoire, qui a renversé le leur, pourrait s’apparenter à de la capitulation ou à une contrainte ou encore à l’appât du gain facile. Par cet acte la classe politique malienne en général et celle qui a accompagné IBK, en particulier foulera aux pieds l’éthique et la morale politique et prêtera à coup sûr le flanc aux critiques acerbes d’une certaine opinion qui pense à tort ou à raison que la classe politique malienne a failli. N’est-il pas réellement temps qu’on procède au renouvellement de la classe politique Malienne ? Les jeunes des différentes formations politiques ne doivent-ils pas s’assumer en poussant pacifiquement la vieille garde à la retraite et pour donner à la politique toutes ses lettres de noblesse?

On aura tout vu sur la scène politique malienne. Si ce ne sont pas les victimes et leurs bourreaux qui cohabitent, c’est un revirement spectaculaire à 180 degré au gré des intérêts partisans et des opportunités, à telle enseigne que l’opinion pense que les militaires en dépit de toutes leurs bourdes, valent mieux que les hommes politiques. Pour une frange importante de l’opinion, les hommes politiques se sont caractérisés par leur inconstance et leur appétit vorace pour les biens publics. En effet, l’appel à voter oui à la nouvelle constitution venant de deux pièces maîtresses du régime défunt, d’IBK, renversé par un coup d’Etat, ne pourrait s’expliquer que par la volonté pour ces deux partis de rester toujours autour du gâteau Mali ou alors de ne pas avoir des démêlées judiciaires. Sinon à défaut de s’opposer à la transition, le RPM et l’ADEMA devraient adopter une posture de neutralité par respect à la mémoire d’IBK et pour le rôle qu’ils ont joué pendant les huit ans du régime déchu. En soutenant ce projet c’est comme si la victime a accepté de s’allier à son bourreau. Au-delà de ces considérations partisanes, qu’est qui pourrait motiver ce choix si ce n’est pour récolter les dividendes politiques. Sinon les militaires au pouvoir et leurs alliés politiques avaient superbement ignoré les dignitaires de l’ancien régime, qui ne les ont d’ailleurs pas associés en amont à la rédaction de la première mouture du projet. En plus de ce mépris souverain du prince du jour, les deux partis étaient farouchement opposés à la rédaction d’une nouvelle constitution que certains cadres du parti de l’abeille avaient qualifié de démocraticide et qu’il n’était pas séant de remplacer une constitution écrite avec le sang des martyrs par une autre issue d’un régime hétéroclite où s’entremêlent putschistes et forces restauratrices de l’ancien régime dictatorial du Général Moussa Traoré. En appelant à voter oui à la nouvelle constitution, l’ADEMA et le RPM ont, semble-il, donné l’occasion aux détracteurs de la classe politique malienne de pouvoir les vilipender en leur collant tous les sobriquets malsains.

Quant au parti de feu Soumaïla Cissé, à savoir l’URD, son soutien à la transition parait objectif et cohérent, car ce parti a tenu la dragée haute contre IBK quand les deux premiers font la lune de miel avec lui. Mais la question que beaucoup d’observateurs se posent est celle de savoir si ce soutien du parti de la poignée des mains à la transition est fait sur la base d’un accord politique scellé entre les deux parties ou si c’est une course de vitesse pour avoir des strapontins. Certains leaders de l’URD pensent que le temps de la traversée du désert a été long donc il faut se rapprocher du pain béni.

N’est-il pas réellement temps qu’on procède au renouvellement de la classe politique ?

En analysant lucidement les mig-mags et autres revirements spectaculaires des cadres et leaders politiques on arrivera à la conclusion que l’on ne peut plus rien tirer de potable de l’actuelle vieille garde de la scène politique malienne. Donc il lui revient de faire son mea maxima culpa en reconnaissant d’avoir échoué et à passer la main à la nouvelle génération. Qui ne serait certainement pas plus meilleure que l’ancienne garde, mais qui apprendrait de ses erreurs. Cette nouvelle génération pourra, de son balbutiement, de son tâtonnement, construire quelque chose de consistant politiquement et permettra à notre démocratie de s’épanouir sainement .

En somme, la classe politique malienne a perdu toute crédibilité aux yeux de l’opinion. Elle a fait l’objet de nombreux manquements à la morale et à l’éthique. Il lui est loisible aujourd’hui de faire sa mue pour céder la place à une nouvelle génération à l’image de l’armée dont les jeunes officiers ont pris leurs responsabilités en mettant à l’écart les vieux généraux ventrus.
Youssouf Sissoko

Source: L’alternance

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