Au Mali, plusieurs initiatives et mesures ont été prises pour faire de la lutte contre la corruption une réussite. Des résultats ont été enregistrés, mais le chemin reste encore long pour crier victoire. Pour cause, en plus de la lenteur des procédures judiciaires dans le traitement des dossiers, un autre handicap majeur a pour nom l’absence d’une loi qui protège les dénonciateurs. Un aspect important que les autorités devraient prendre en compte pour donner plus d’efficacité à la lutte contre la corruption au Mali.
La corruption est un phénomène qui annihile les efforts de
développement d’un pays. Ses effets touchent toutes les couches sociales
et freinent considérablement le développement. Malgré la mise en place
de certaines mesures législatives pour lutter contre ce phénomène, il
persiste. Le hic est que les agents véreux qui s’adonnent à cette
pratique sont généralement connus. Malheureusement, faute d’une loi qui
réglemente la dénonciation, très généralement, les victimes ou témoins
des pratiques de corruption s’abstiennent de dénoncer auprès de qui de
droit.
Il est évident que sans une implication de la population, à travers la
dénonciation et non la calomnie, certaines formes de corruptions
resteront toujours impunies.
La volonté affichée par le Président de la République d’engager une
lutte farouche contre la corruption est restée au stade de l’effet
d’annonce. Malgré que l’année 2014 ait été dédiée au Mali comme une
année de lutte contre la corruption, les Maliens sont restés sur leur
faim.
Les différents rapports du Vérificateur général remis régulièrement au
président de la République prouvent à suffisance le niveau de
délabrement de l’économie du pays à cause des malversations en tout
genre impliquant divers acteurs. La corruption touche tous les secteurs
de développement. De l’attribution des marchés publics aux simples
contrôles de formalité sur les voies publiques par les Policiers, les
prédateurs sucent l’économie du pays. Le plus souvent, sans être
inquiétés, car se sentant loin des regards de la justice.
Pour corriger cela, la réglementation de la dénonciation est une
nécessité. Mais le paradoxe est qu’au Mali aucune loi ne protège le
dénonciateur, contrairement aux pays cités en exemple en matière de
lutte contre la corruption.
C’est un acte de citoyenneté quand une personne s’engage à dénoncer ou à
témoigner dans le cadre d’une procédure administrative, policière ou
judiciaire. Par cet engagement, cette personne volontaire doit être
protégée par l’État à travers l’adoption d’une loi. Cela est aujourd’hui
une nécessité au Mali, compte tenu du rôle essentiel des dénonciateurs,
lanceurs d’alertes et des témoins pour la réussite des investigations.
À défaut d’une telle loi, les dénonciateurs, les témoins peuvent être
intimidés, découragés et attaqués par la personne dénoncée. Une fois que
cette loi sera en vigueur, toute personne ayant connaissance d’un délit
ou d’un crime sera obligée de le dénoncer ou de témoigner devant
l’autorité compétente pour investigation et sanction.
Cette loi sera d’un apport essentiel dans la lutte contre la corruption,
car le dénonciateur ne se sentira exposé à aucun danger ou risque pour
son intégrité physique ou celle des membres de sa famille ou des
personnes qui lui sont proches.
Ces derniers mois, la lutte contre la corruption a pris une nouvelle
tournure au Mali. Des acteurs de la société civile regroupés au sein
d’une plateforme amplifient la pression pour bouter la pratique de
corruption hors du Mali. Mais, il se trouve que l’absence d’une loi qui
protège les dénonciateurs handicape cette Plateforme qui peine à
dévoiler la liste des personnes les plus corrompues au Mali. Une liste
qu’elle dit détenir, il y a de cela quelques mois maintenant.
PAR MODIBO KONE