Sans grande surprise Kidal, le départ du Bataillon de la nouvelle armée reconstituée de Gao à Kidal fixé à ce 1er février est reporté sine die. Quels sont les dessous de ce rendez-vous manqué avec l’histoire ?
L’Armée confirme ce report sans en faire tout un pataquès. « Ils ne sont pas encore à Kidal, mais la préparation se poursuit activement. On doit faire l’économie du niveau de cette préparation, mais ils seront incessamment à Kidal », fait savoir le colonel-major Diarran KONE, Directeur de la Direction de l’Information et de Relations Publiques des Armées (DIRPA) à propos du Bataillon des Forces de Défense et de Sécurité Reconstituées (FDS-R) à Kidal.
Pourtant, certaines informations communiquées, à la faveur de la 13e session extraordinaire de la Commission Technique de Sécurité (CTS) qui s’est tenue le 24 janvier 2020, à Bamako, dont l’un des points à l’ordre du jour portait sur le Plan de redéploiement détaillé du Bataillon des Forces de Défense et de Sécurité Reconstituées (FDS-R) à Kidal, présageaient un report. Il y avait des blocages objectifs irréfragables. La situation présentée par le Coordinateur du MOC, lors de la 13e session extraordinaire de la Commission Technique de Sécurité (CTS), était prémonitoire d’un report du redéploiement des éléments de la nouvelle armée reconstituée à Kidal. En effet, sur 60 engins annoncés, seulement 23 Kia (véhicules) étaient en place à Gao. Si tous les éléments ont été dotés d’un gilet et d’un casque lourd, les besoins en habillement et couchage restaient insatisfaits. Il en était de même des matériels optiques, de transmission, d’EOD et des matériels spécifiques qui ont fait l’objet d’une demande adressée aux autorités.
Selon le MOC, le Bataillon des Forces de Défense et de Sécurité Reconstituées (FDS-R) à Kidal n’avait toujours pas reçu la dotation de carburant pour le déplacement de Kidal. Donc, les FDS-R étaient clairement au pain menu.
Bien sûr, l’état-major général des armées du Mali voit autrement le tableau. Répondant à l’interpellation du président de la CTS à la suite de la présentation de la coordination du MOC, le représentant du CEMGA soutient, en ce qui concerne les moyens roulants que tous les conducteurs ont déjà été transportés sur le site et que les véhicules KIA sont déjà dotés d’équipements de transmission.
« Concernant l’armement collectif, des armes neuves ont été ‘’réalisées’’ par le Gouvernement malien et ont déjà été attribuées au Bataillon. De plus, tous les éléments du Bataillon ont été dotés d’équipements individuels » rétorque-t-il.
L’on notera aisément que le représentant du CEMGA a eu tendance à éluder les vraies questions. Par exemple, il ne dit pas que les 60 engins annoncés sont bel et bien sur place à Gao, mais qu’ils sont dotés de matériels de transmission. Il fait totalement l’impasse sur la dotation de carburant pour le déplacement de Kidal. C’est cet imbroglio que la MINUSMA a tenté, lors de son traditionnel point de presse du 16 janvier dernier, d’emmitoufler dans un échafaudage diplomatique : ‘’l’état-major des armées et les mouvements ont beaucoup travaillé avec nous sur ce plan de redéploiement de ces premières unités. Nous soutenons l’état-major général. Une partie de ces éléments sont déjà à Gao. L’état-major doit finaliser toutes ces étapes et les redéployer’’. C’est clair que tout n’est pas que strass et paillettes. Il serait d’ailleurs une vue de l’esprit de se faire une telle représentation dans un contexte de défiance et de méfiance des parties les unes envers les autres.
Outre la question des moyens, les effectifs annoncés ne sont pas non plus complets. Ainsi, alors qu’un total de 428 éléments des Forces de Défense et de Sécurité Reconstituées sont redéployés à Kidal, dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (APR), 91 éléments formés manquent à l’appel, constate la 13e session extraordinaire de la Commission Technique de Sécurité (CTS) qui s’est tenue le 24 janvier dernier, dans la capitale. Où sont-ils passés ? Quelle réaction de la hiérarchie militaire ?
Le Coordinateur du MOC a dévoilé la clé de répartition suivante des éléments redéployés à Kidal ce 1er février, selon le chronogramme adopté : FAMa : 176 éléments, 0 absent, dont 28 éléments de soutien (Génie, santé, Trans, GATA, et Prévôté) ; CMA : 116 éléments, 47 absents ; Plateforme : 127 éléments, 44 absents ; inclusivité : 9 éléments, 0 absent. Soit un effectif total de 428 éléments, sur lequel 91 éléments manquent à l’appel.
Réponse du Président de la CTS : ‘’pour parvenir à une bonne inclusion, les effectifs des Bataillons devraient être revus et corrigés’’. ‘’Il s’agira donc pour les absents de préciser leur situation pour permettre si nécessaire de procéder à des remplacements’’. Une solution plus facile à énoncer qu’à appliquer puisqu’autant la CMA et la Plateforme dénoncent le non-respect de la règle du 1/3 prévue par l’accord. De plus, la CMA a déclaré que le principe d’attribution du commandement n’avait pas été respecté et cela pourrait être constaté au niveau des compagnies.
In fine, il existe encore des cohérences à établir. Ceci expliquant cela, le Bataillon des Forces de Défense et de Sécurité Reconstituées (FDS-R) à Kidal (ce qui peut être considéré comme tel), peut ronger son frein à Gao. En attendant ‘’le feu vert de la hiérarchie’’ pour l’effectivité du redéploiement à Kidal.
PAR BERTIN DAKOUO