Gestion des contentieux électoraux au Mali : La Cour constitutionnelle peut-elle reconquérir son crédit perdu ?

« Erreurs matérielles », manqué de pertinence des arguments développés, inconsistance de certains arguments juridiques, penchant avéré à inverser les résultats provisoires en faveur du parti au pouvoir, légèretés déconcertantes dans les interventions, etc, la Cour constitutionnelle s’est éloquemment illustrée ces derniers jours par un certain amateurisme.

Par ses arrêts et avis plus que critiquables, la Cour constitutionnelle a fini parexhiber son  incompétence. Ou ce qui s’apparente à un amateurisme plutôt décourageant pour les acteurs sociopolitiques. « Ils ne méritent pas le titre de sages, les 9 conseillers de cette Cour Constitutionnelle », s’agaçait samedi dernier, un cadre politique travaillant à Sikasso. Il déplorait ainsi les dernières interventions de la Haute juridiction dans le cadre des élections législatives qui viennent de se tenir.

En effet, depuis la phase de la proclamation des candidatures à ces élections à l’arrêt de validation des candidatures, la présidente de la Cour Constitutionnelle et ses conseillers se sont illustrés par des prestations décevantes. Mme Manassa Danioko a régulièrement donné l’impression que son institution ne maîtrisait même le dispositif législatif qui régit les élections législatives. Elle n’a pas fait la bonne lecture qu’il fallait de la modification intervenue dans la loi électorale.

Elle a étonnamment commis des « erreurs matérielles » et d’autres fautes dont certaines étaient la conséquence de négligences coupables. A titre d’exemple, la Cour n’a pas su que le candidat Belco Samassékou, député sortant de Mopti, était une femme. Et elle n’a pas cru devoir passer un simple coup de fil pour vérifier cette donnée.

La Cour avait également commis nombre de bévues qui avaient poussé le leader du CNID-FYT, Me Mountaga Tall, à dénoncer l’image négative qu’elle donnait du Mali. Et Me Tall avait alors invité les 9 sages «  à se ressaisir pour mieux dire le droit en faisant preuve de plus de professionnalisme. Rien n’y fit. La Cour a poursuivi dans ses « légèretés », et le comble est ce à quoi on vient d’assister.

Dans son arrêt du jeudi dernier, la Cour a développé des argumentaires quelques contradictoires pour trancher les contentieux d’une circonscription électorale à une autre. Elle s’est souvent contentée de «manque de preuves » pour qualifier plusieurs recours de « mal fondés » ou de « sans fondement ». Ce qui lui a permis aussi d’annuler les opérations de vote dans plusieurs centres de vote, alors qu’elle a décelé la violation de la loi électorale dans un bureau de vote. Doit-on annuler les résultats de tout un centre de vote pour un changement illégal du président ou des assesseurs d’un bureau de vote ? C’est le cas en commune VI du district de Bamako (et ailleurs) où les résultats de Missabougou ont été annulés au détriment de l’alliance URD-LDC.

Ailleurs comme à Yanfolila, la Cour s’est fourvoyée en déclarant élus des candidats qui avaient récolté moins de 50 % des suffrages avant de procéder à la rectification pour « erreur matérielle». Des situations similaires semblent être constatées par des observateurs dans des circonscriptions électorales de Sikasso, Bougouni, Kati, Mopti, commune V, commune I, etc.

Des résultats qui ont provoqué de vives échauffourées dans diverses zones du territoire national. C’est ainsi que Sikasso, Bougouni, Mopti, Kati, certains quartiers de la Commune I, de la commune V ont enregistré des manifestations de protestations des électeurs pour ces inversions spectaculaires des résultats provisoires du second tour de ces législatives. Des situations dont le Mali n’a aucunement besoin par ces temps où le pays est confronté à plusieurs défis.

Faut-il rappeler que lors des élections présidentielles passées ainsi dans le débat pour la révision constitutionnelle, Manassa Danioko et sa Cour s‘étaient déjà illustrées par des sorties non rassurantes. Toute chose qui a beaucoup décrédibilisé l’institution. Une perte de crédit qui fait tâche d’huile, surtout que la Haute Cour  est conduite à se dédire par endroits. Dommage !

Boubou SIDIBE
Source: Maliweb.net

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