Iran: les États-Unis affirment que les sanctions de l’ONU sont à nouveau en vigueur

Washington assure que les sanctions internationales contre l’Iran sont de nouveau mises en place. Contre l’avis des pays membres de l’ONU, les Américains promettent de punir quiconque les violerait.

Avec notre correspondante à Washington, Loubna Anaki

C’est une décision unilatérale des États-Unis annoncée par le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo dans la nuit de samedi à dimanche. Il prévient même que tout pays qui ne respecterait pas ou n’appliquerait pas cette décision s’exposera à son tour à des sanctions. Un message et une menace à peine voilée adressés aux autres États-membres de l’ONU.

Washington isolé sur l’Iran

Il y a un mois, le Conseil de sécurité avait rejeté une résolution des États-Unis contre l’Iran. Les Américains avaient alors prévenu qu’ils passeraient en force en utilisant le mécanisme dit « snapback ». Un mécanisme qui permet, en principe, à Washington ou tout autre État signataire de forcer unilatéralement l’ONU à rétablir l’ensemble des sanctions imposées à l’Iran avant l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien.

Or, techniquement, les États-Unis ayant quitté cet accord à l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, les autres pays membres des Nations unies estiment qu’ils n’ont plus le droit d’utiliser ce mécanisme.

Vendredi 18 septembre, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni avaient répondu par avance, estimant que toute décision ou mesure prise pour rétablir les sanctions n’aurait aucun effet juridique. Les États-Unis sont isolés sur cette question et les tensions risquent de plonger l’ONU dans une crise sans précédent.

L’Iran appelle le monde à « parler d’une seule voix »

Téhéran a réagi ce dimanche 20 septembre, lors d’une conférence de presse. Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères a appelé le monde à « parler d’une seule voix » contre les « actions irresponsables » américaines.

Un peu plus tôt, la Russie avait dénoncé la déclaration unilatérale par les États-Unis que les sanctions des Nations unies étaient de nouveau en vigueur, soulignant que les affirmations de Washington étaient dénuées de fondement légal. « Les initiatives et actions illégitimes des États-Unis ne peuvent par définition avoir de conséquences internationales légales pour les autres pays », a déclaré le ministère dans un communiqué.

La Russie est très critique de la décision américaine. Proche de Téhéran, Moscou fait partie des signataires du traité sur le nucléaire iranien, et a dénoncé une « pièce de théâtre » rapporte notre correspondant à Moscou, Léo Vidal-Giraud

« Les États-Unis continuent de tromper la communauté internationale en spéculant sur le rétablissement des sanctions au Conseil de sécurité » Le ministère russe des Affaires étrangères a eu des mots très durs ce dimanche pour commenter l’initiative américaine.

Critiquer l’action internationale des États-Unis est l’une des constantes de la diplomatie russe. Et avec ce rebondissement dans l’affaire du nucléaire iranien, Moscou a beau jeu de dénoncer le non-respect de Washington pour le droit international.

L’occasion pour la Russie de renverser les rôles. Souvent isolée sur des questions comme l’Ukraine, la Biélorussie, la Syrie, elle est sur le dossier Iranien associée aux Européens, et se paie le luxe de passer de la position d’accusé isolé à celle d’accusateur à l’unisson du reste de la communauté internationale.

« Tout ce que font les États-Unis n’est qu’une pièce de théâtre, ajoute le communiqué du ministère, une pièce qui vise à soumettre le Conseil de sécurité à sa politique et à en faire son instrument. » « Mais, conclut-il, le numéro a raté. »


La décision de Washington intervient alors que l’économie iranienne est déjà durement touchée par les sanctions américaines imposées depuis plus de deux ans.

Avec notre correspondant à Téhéran, Siavosh Ghazi

Les autorités iraniennes affirment sans cesse que la décision américaine n’a aucune valeur juridique puisque Washington a quitté l’accord nucléaire de 2015. Il n’empêche. L’économie iranienne est durement frappée par les sanctions américaines imposées depuis 2017. La monnaie iranienne est en chute libre depuis deux ans. Un dollar américain valait 30 000 rials il y a deux ans, aujourd’hui, le billet vert vaut 270 000 rials soit neuf fois plus.

Le gouvernement iranien a reconnu récemment que les exportations pétrolières, sanctionnées par les Etats-Unis, sont désormais quasiment inexistantes. Ce qui touche de plein fouet le budget du gouvernement. Avant les sanctions américaines, l’Iran exportait quotidiennement plus de 2,5 millions de barils de pétrole par jour.

Les Iraniens et plus particulièrement les couches les plus défavorisées ressentent durement la dégradation de la situation économique et l’inflation qui dépasse les 50%. Dans ces conditions, la décision américaine pourrait aggraver encore la situation économique du pays.

Source: RFI 

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