Afghanistan: les talibans assurent vouloir une transition pacifique

Les talibans ont ordre de rester aux portes de Kaboul et de ne pas entrer dans la ville, a annoncé ce dimanche 15 août l’un de leurs porte-parole, alors que les insurgés encerclent désormais la capitale, seule région manquante à leur contrôle sur le pays. Le ministre de l’Intérieur a déclaré qu’il n’y aurait pas d’attaque, mais un transfert pacifique du pouvoir vers un gouvernement de transition. Les talibans sont sur la même ligne.

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Selon l’application Flightradar, qui recense l’ensemble des vols civils internationaux, les plus surveillés ce dimanche sont au départ de Kaboul, capitale encerclée par les talibans. Le monde scrute donc l’Afghanistan, sur le point de revenir dans le giron des insurgés, vingt ans après l’intervention internationale de 2001. Provoquée par les attentats du 11-Septembre, cette intervention avait conduit à la fuite du mollah Omar, chef du Conseil suprême de l’Émirat islamique afghan et allié d’Oussama Ben Laden.
Le ministre afghan de l’Intérieur a déclaré ce dimanche, dans un message vidéo, qu’un « transfert pacifique du pouvoir » allait rapidement s’opérer vers un gouvernement de transition. « Les Afghans ne doivent pas s’inquiéter », assure Abdul Sattar Mirzakwal. « Il n’y aura pas d’attaque sur la ville », ajoutait-il, alors que le président Ashraf Ghani, plus que jamais sur la sellette, ne s’était pas encore exprimé – ce qu’il a fait depuis lors.


« L’Émirat islamique ordonne à toutes ses forces d’attendre aux portes de Kaboul, de ne pas essayer d’entrer dans la ville », a déclaré ce dimanche matin, sur le réseau social Twitter, un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid. « Nous ne voulons pas qu’un seul civil afghan innocent soit blessé ou tué. » Des habitants contactés par l’Agence France-Presse avaient rapporté que des combattants talibans armés étaient présents dans leur quartier. Mais « il n’y a pas de combats », précisait l’un d’eux.
Les talibans ont confirmé vouloir récupérer le pouvoir en Afghanistan sans effusion de sang, par un transfert pacifique. Cela pourrait avoir lieu sur plusieurs jours, ont-ils expliqué à la BBC. « Dans les jours à venir, nous voulons un transfert pacifique » du pouvoir, a en effet assuré Suhail Shaheen, un porte-parole basé au Qatar, dans le cadre d’un groupe engagé dans les négociations. 
Le président est-il sur cette ligne ? Ashraf Ghani a finalement pris la parole à la mi-journée, heure de Paris, ce dimanche. Il a demandé aux forces de sécurité de garantir « la sécurité de tous les citoyens », en maintenant l’ordre public à Kaboul, point. « C’est notre responsabilité et nous le ferons de la meilleure manière possible. Quiconque pense à créer le chaos ou à piller sera traité avec force », a déclaré le chef de l’État dans un message vidéo envoyé à la presse.


L’ambiance est étrange, électrique, explique notre correspondante Sonia Ghezali. Signe de la présence des talibans dans la ville et sa périphérie, on apercevait dans la matinée des fumées dans l’ouest de Kaboul, où vit la minorité chiite. Des échoppes y ont été brûlées par les insurgés, raconte un habitant contacté par RFI. Des portraits de femmes ont aussi été arrachés des devantures de certaines boutiques, comme les salons de beauté. Les ambassades sont en train d’évacuer leurs ressortissants.
Les insurgés s’étaient déjà emparés sans résistance ce dimanche de la ville de Jalalabad, position-clé sur la route du Pakistan voisin, quelques heures après avoir pris Mazar-i-Sharif, quatrième plus grande ville afghane et principal centre urbain dans le nord. Méthodiquement, les talibans se sont rapprochés cette semaine d’une prise complète du pouvoir sur le terrain, après une campagne militaire d’une rapidité stupéfiante qui les amène, aujourd’hui, à contrôler plus d’une vingtaine de provinces.
Une poignée de villes mineures, sans importance stratégique, éparpillées, sont encore sous le contrôle du gouvernement. Mais elles sont coupées de Kaboul. La déroute est totale pour les forces de sécurité afghanes, abreuvées pendant deux décennies de centaines de milliards de dollars par les États-Unis. La défaite est également cuisante pour le président Ashraf Ghani, coincé entre deux positions impossibles : capituler et démissionner, comme il est invité à le faire, ou combattre au risque d’un bain de sang ?


Source: RFI

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